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Johnny Depp VS Amber Heard

  • Photo du rédacteur: Lisa Noa Zbinden
    Lisa Noa Zbinden
  • 2 janv.
  • 3 min de lecture

J'ai longuement hésité à écrire ces quelques mots car je sais combien l'affaire Amber Heard versus Johnny Depp est sensible et clivante. Mais je ressentais le besoin de partager quelques-unes des réflexions que je me suis faites depuis que le verdict est tombé.


(Je précise d'avance que le but de cet article n'est pas de prendre parti ou de remettre en question le verdict de la justice américaine, mais d'avoir une approche critique du traitement médiatique de cette affaire.)


Tout d'abord, qu'elle soit coupable ou non, j'ai été écœurée par la façon dont les médias ont dépeint Amber Heard du moment où sa parole a été remise en question. En un flash, elle est passée du statut de victime présumée de violences conjugales à celui de

"menteuse, manipulatrice et abuseuse. Tout au long du procès, elle a été sujette à des attaques violentes et démesurées - souvent à caractère misogyne. Son langage corporel et chacune de ses réactions ont été scrutés ; ses pleurs moqués et décrédibilisés. Les réseaux sociaux l'ont caricaturée, en ont fait des "memes' et l'ont affublée des pires noms. C'était un véritable acharnement. Il n'y avait aucune place au doute, l'opinion publique avait tranché : Amber Heard était une harpie sans cœur qui ne méritait pas une once de compassion.


Un véritable double standard dans une société où les auteurs présumés de violences envers les femmes sont systématiquement protégés, défendus et innocentés car, soi-disant, trop séduisants, trop aimables, trop talentueux, trop populaires - et j'en passe - pour être jugés coupables.


Un autre élément qui m'a beaucoup dérangée est la sur médiatisation de cette affaire, présentée comme le procès de la décennie. Tous les journaux, aux quatre coins du globe, s'en sont emparés. En l'espace de quelques semaines, Johnny Depp est devenu le symbole de la lutte contre les fausses accusations, l'ambassadeur de la diffamation. Son équipe de défense, à commencer par son avocate, a été célébrée : des véritables héro·ïnes des temps modernes ! À mon sens, cette affaire a bien arrangé les médias car elle nourrit et 'confirme la rhétorique (dangereuse et fausse), selon laquelle les femmes accuseraient systématiquement à tord les hommes. Cette rhétorique, qui prend de plus en plus d'ampleur depuis le mouvement #metoo, change le focus : en mettant l'accent sur la supposée tendance des femmes à mentir (et le danger que cela représente pour les hommes innocents) plutôt que sur la prégnance des violences.


Si ces mêmes médias qui ont couvert toute l'affaire de A à Z avaient réellement l'intérêt des victimes de violences en tête, ils ne resteraient pas silencieux, le reste de l'année, sur tellement d'autres sujets : où étaient ils toutes ces fois où les voix des femmes victimes de violences étaient ignorées, traînées dans la boue, discréditées? Où étaient ils quand des auteurs (présumés) de violences étaient, encore et encore, protégés par le système ?


Le mouvement #metoo a permis de mettre en lumière l'ampleur des violences (majoritairement faites aux femmes). Mais ne croyons pas naïvement - comme veulent souvent nous le faire croire les médias - que nous vivons dans un monde où les victimes ont repris le pouvoir. Une minorité seulement des victimes portent plainte - et parmi elles, très peu voient leur agresseur derrière les barreaux. Être entendues, crues et soutenues par la justice reste un combat, loin d'être gagné.


D'ailleurs, plusieurs articles, ont mis en lumière le fait que les plaintes en diffamation sont utilisées, de plus en plus fréquemment, par les accusés pour faire taire et décourager les victimes. C'est le cas notamment de Patrick Poivre d'Arvor, qui a porté plainte pour dénonciations calomnieuses contre 16 femmes qui l'ont accusé de harcèlement et de violences sexuelles.


C'est pour toute ces raisons que la fixation des médias sur cette affaire de 'diffamation' n'est pas anodine. Cette sur visibilisation cache une invisibilisation. Entendez-moi bien, je ne dis pas qu'il faut ignorer les questions de présomption d'innocence et de diffamation, mais je crois que nous devons faire attention à ce qu'elles ne prennent pas le dessus. Il nous faut nous battre pour un traitement médiatique moins biaisé, plus égalitaire, qui encourage les victimes à faire entendre leur voix plutôt que de les terrer davantage dans le silence et la honte.


Image @cnet.com

 
 
 

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